Le 4 novembre 2025, le gouvernement du Canada a déposé le budget fédéral de 2025 (le budget de 2025), qui souligne sa détermination à moderniser la réglementation du secteur des services financiers et à renforcer les cadres réglementaires en place pour lutter contre la criminalité financière. Parmi les principales mesures touchant le secteur, notons des services bancaires axés sur les consommateurs (système bancaire ouvert), une stratégie antifraude, des mesures de protection des consommateurs visant les fonds déposés par chèque et les frais bancaires, de même qu’un cadre législatif pour réglementer l’émission de cryptomonnaies stables adossées à une devise.
Le présent bulletin présente des mesures proposées qui redéfiniront la réglementation des services financiers et traite de leur incidence pour des acteurs du secteur tels que les institutions financières, les sociétés de technologies financières et les fournisseurs de services de paiement.
Établir un cadre réglementaire pour les cryptomonnaies stables
Le budget de 2025 propose d’adopter une loi, que fera appliquer la Banque du Canada, pour réglementer l’émission de cryptomonnaies stables adossées à une devise au Canada. Des modifications connexes seraient apportées à la Loi sur les activités associées aux paiements de détail pour régir les fournisseurs de services de paiement qui exécutent des fonctions de paiement au moyen de cryptomonnaies stables visées.
Le cadre proposé imposera sans doute des obligations relatives aux réserves, à la garde et d’ordre opérationnel, car il prévoira que les émetteurs devront maintenir et gérer des réserves d’actifs suffisantes, établir des politiques de rachat, mettre en œuvre des cadres de gestion des risques et protéger les renseignements personnels et sensibles des Canadiens. Il prévoira aussi des garanties relatives à la sécurité nationale.
On ignore pour le moment comment le projet de réglementation fédérale s’accordera avec la position actuelle des autorités en valeurs mobilières provinciales, selon laquelle les cryptomonnaies stables (que les autorités appellent des « cryptoactifs arrimés à une valeur ») sont actuellement considérées comme des valeurs mobilières ou des dérivés.
Prochaine phase des services bancaires axés sur les consommateurs
Le gouvernement fédéral réaffirme aussi son engagement à l’égard des services bancaires axés sur les consommateurs (système bancaire ouvert), en annonçant qu’il accélérera la prochaine phase de leur réglementation au Canada, notamment en légiférant sur la capacité de demander qu’une opération soit réalisée, comme le transfert de comptes ou le paiement de factures, ou l’« accès en écriture », d’ici le milieu de 2027, une fois que le projet de système de paiement en temps réel du Canada sera opérationnel et en usage. La Banque du Canada surveillera l’application de la Loi sur les services bancaires axés sur les consommateurs.
Agence canadienne des crimes financiers et Stratégie nationale antifraude
Comme prévu, le gouvernement créera l’Agence canadienne des crimes financiers, qui sera le principal organisme de lutte contre les crimes financiers au Canada. Le budget de 2025 indique que cette agence sera un modèle d’excellence et visera à réunir l’expertise policière et l’expertise civile requises pour enquêter sur des cas complexes de blanchiment d’argent, d’activités criminelles organisées et de fraude en ligne, et récupérer les produits illicites qui en découlent.
Le projet de loi visant à mettre sur pied cette agence devrait être déposé d’ici le printemps 2026.
La fraude demeurant un fléau, une Stratégie nationale antifraude sera lancée afin de mieux protéger les Canadiens. Cette stratégie se voudra intersectorielle : des institutions financières et des entreprises de technologie et de télécommunications collaboreront pour faire échec à des stratagèmes frauduleux en constante évolution et extrêmement complexes.
Mesures relatives aux services bancaires
Le budget de 2025 comprend également plusieurs mesures axées sur la protection des consommateurs, dont la proposition de modifier la Loi sur les banques pour augmenter à 150 $ la première tranche immédiatement disponible de fonds déposés par chèque et éliminer la distinction entre le dépôt en personne ou par d’autres moyens.
Il propose aussi des modifications législatives à la Loi sur les banques pour :
- permettre l’examen de certains types d’investissements effectués par les banques étrangères et leurs filiales dans des entreprises canadiennes, sur la base des risques pour la sécurité nationale;
- exiger que les banques adoptent des politiques et des procédures pour contrer la fraude ciblant les consommateurs;
- exiger que les banques communiquent à l’Agence de la consommation en matière financière du Canada certaines données précisés par règlement au sujet de la fraude ciblant les consommateurs; des données anonymisées seraient ensuite transmises au ministre des Finances pour guider l’élaboration des politiques relatives à la fraude financière;
- permettre aux consommateurs d’établir le montant maximal des opérations pouvant être faites dans leurs comptes bancaires, et obliger les banques à obtenir le consentement des consommateurs avant l’activation ou la désactivation de certaines fonctions de leurs comptes (précisées par règlement);
- réduire les frais facturés aux consommateurs pour le transfert d’un compte vers une autre institution après la fermeture de leur succursale, notamment en exigeant que les banques publient un avis sur leur site Web en cas de fermeture de succursales, et en clarifiant les règles applicables à l’ouverture de compte en ligne;
- réduire les obstacles au changement de compte en interdisant les frais de transfert, en fixant des délais relatifs aux transferts et en améliorant la communication d’informations sur les transferts de comptes enregistrés et de placement; le gouvernement collaborera avec les banques et d’autres parties prenantes en vue de simplifier le processus de transfert de comptes chèques principaux;
- améliorer l’accès des petites institutions financières aux canaux de distribution des dépôts effectués par l’entremise de courtiers.
Le gouvernement a demandé à l’Agence de la consommation en matière financière du Canada de préparer un rapport sur le barème, le montant et la transparence des frais facturés par les banques canadiennes, et il travaillera avec les banques à l’élaboration d’un Code de conduite pour la prévention de l’exploitation financière.
Autres mesures relatives aux institutions financières fédérales
Le budget de 2025 propose d’autres mesures touchant les banques et d’autres institutions financières sous réglementation fédérale, dont les suivantes :
- modifier la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés d’assurances et la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt pour instaurer un mode de livraison « avis et accès » pour la transmission de documents de gouvernance, tout en conservant le droit des propriétaires de demander une transmission par la poste;
- modifier la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières pour renforcer la capacité du surintendant à échanger des renseignements avec les agences et organismes fédéraux gouvernementaux, et pour renforcer les pouvoirs dont dispose le surintendant des institutions financières pour atténuer les risques liés à l’intégrité et à la sécurité;
- modifier la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés d’assurances et la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt afin de hausser le seuil de capitaux propres pour l’exigence de 35 % en matière de détention publique, qui passerait de 2 milliards de dollars à 4 milliards de dollars.
Soutien à la croissance et à la compétitivité des coopératives de crédit
Le budget de 2025 propose de modifier la Loi sur les banques, la Loi sur la Société d’assurance-dépôts du Canada et la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada pour permettre aux coopératives de crédit fédérales de croître par fusion ou par acquisition d’actifs, et pour faciliter leur conversion en coopératives de crédit fédérales.
Mesures de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes
Le budget de 2025 propose de modifier la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT) et ses règlements pour limiter les transactions en espèces de 10 000 $ ou plus et les dépôts en espèces effectués par une personne sur le compte d’une autre personne (c’est-à-dire les dépôts en espèces par des tiers).
Il propose aussi des modifications à la LRPCFAT et des modifications connexes à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques pour créer un droit à la mobilité des données et clarifier les dispositions relatives à l’échange de renseignements entre les secteurs public et privé, à l’appui du mandat du Partenariat intégré sur le renseignement en matière de blanchiment d’argent entre les organismes d’application de la loi et les grandes banques du Canada.
Intelligence artificielle
Le budget de 2025 annonce que le gouvernement collaborera avec le secteur privé et se penchera sur les moyens de favoriser l’adoption de l’intelligence artificielle dans le secteur financier, tout en venant renforcer la confiance à l’égard de son utilisation et stimuler l’innovation.
Regard vers l’avenir
Les mesures du budget de 2025 qui touchent le secteur des services financiers sont en grande partie des propositions législatives dont la loi de mise en œuvre devrait être présentée peu après l’adoption du budget. Ce budget marque un tournant dans la réglementation des services financiers au Canada. Qu’il soit question des services bancaires axés sur les consommateurs, de la surveillance des cryptomonnaies stables ou du renforcement de la lutte contre la criminalité financière, les mesures que propose le gouvernement vont dans le sens de la poursuite de la modernisation du système financier. Les entités touchées, dont les institutions financières, les sociétés de technologies financières et les fournisseurs de services de paiement, devront impérativement se mobiliser et se préparer activement aux changements pour assurer leur conformité et maintenir leur positionnement concurrentiel dans un environnement réglementaire en transformation.
Communiquez avec nous
Pour en savoir plus sur les mesures ci-dessus, ou pour obtenir de l’assistance relativement aux exigences de conformité s’y rapportant, communiquez avec l’une des personnes-ressources ci-dessous ou avec le groupe Services bancaires et financiers de BLG.