Cet article fait partie d’une série rédigée à l’intention d’entités internationales qui souhaitent lancer ou exploiter une entreprise au Canada, ou encore investir dans une société canadienne. Du droit de l’emploi au droit fiscal, chaque article couvre un secteur juridique fondamental au Canada et fait l’objet d’une mise à jour annuelle. Vous trouverez toute la série sur la page Faire affaire au Canada : Guide pratique de A à Z.
Le Canada accorde une grande importance à son statut de chef de file mondial de l’innovation, c’est pourquoi la propriété intellectuelle occupe une place de premier plan dans la législation du pays. Comme l’explique le présent chapitre, les entreprises peuvent créer de la valeur notamment dans les secteurs d’activité où la proportion de titulaires de droits de propriété intellectuelle (DPI) est élevée en acquérant des droits exclusifs sous la forme de brevets, de marques de commerce, de droits d’auteur, de dessins industriels, de secrets commerciaux et autres, puis en les commercialisant pour en tirer profit.
En janvier 2025, l’Office européen des brevets et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle ont publié conjointement une étude démontrant que les entreprises qui possèdent des DPI surpassent celles qui n’en détiennent pas. Cet état de fait s’applique tant aux grandes sociétés qu’aux petites ou moyennes entreprises (PME). L’étude permet également de constater que les recettes générées par employé et les salaires étaient plus élevés chez les entités détentrices de DPI. Cette différence s’observe pour tous les types de droits : brevets, marques de commerce et droits attachés aux dessins ou modèles, pris individuellement ou conjointement. Une étude effectuée en 2022 par ces mêmes groupes estimait que plus de 47 % de l’activité économique globale de l’UE était générée par des secteurs à grande proportion de titulaires de DPI, et que 39 % de l’emploi en UE étaient directement ou indirectement associés à ces secteurs. La même année, le département du Commerce des États-Unis a publié un rapport intitulé Intellectual Property and the U.S. Economy: Third edition qui révélait que les secteurs du pays à grande proportion de titulaires de DPI employaient au moins 63 millions de personnes (33 % de tous les salariés) et contribuaient à plus de 41 % du PIB.
Brevets
Les innovations technologiques et les inventions sont le moteur de nombreuses entreprises, et les brevets permettent d’en protéger la valeur.
Lorsqu’un inventeur ou le propriétaire d’une invention obtient un brevet, la loi lui accorde le droit de fabriquer, de vendre et d’utiliser l’invention en exclusivité.
En échange, il doit divulguer suffisamment d’information sur l’invention pour permettre à d’autres de la reproduire et de l’utiliser une fois le brevet expiré. Au Canada, la durée de validité d’un brevet est de 20 ans à compter de la date du dépôt de la demande. Il existe cependant deux types de demandes pour rétablir la durée d’un brevet; le premier pour les retards de traitement du Bureau des brevets, et l’autre pour les retards d’approbation d’un produit par Santé Canada. Lorsqu’un brevet associé à un produit pharmaceutique est admissible à une prolongation dans ces deux cas de figure, les périodes supplémentaires accordées sont concomitantes.
La Loi sur les brevets définit une invention de la façon suivante : « toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité ». Pour pouvoir être brevetée au Canada, une invention doit respecter des critères de nouveauté, d’utilité et d’inventivité, en plus de faire partie des objets brevetables abordés ci-après.
À l’instar de la plupart des pays, le Canada a adopté la règle du « premier déposant » selon laquelle la personne en droit d’obtenir le brevet d’une invention sera la première à déposer une demande à cet égard. Par ailleurs, le Canada est signataire du Traité de coopération en matière de brevets, qui offre aux demandeurs de brevets une méthode peu coûteuse pour déposer leurs demandes à l’international, y compris au Canada, et garder la même date de dépôt à l’échelle mondiale.
Le Canada n’exige pas la nouveauté à tout prix. Une personne peut donc déposer une demande de brevet canadien dans l’année suivant la première divulgation publique de l’objet d’une invention si elle (ou un tiers à qui elle aurait fourni l’information) est à l’origine de cette divulgation. De façon similaire, un délai de grâce d’un an suivant la divulgation initiale par le demandeur (ou par un tiers que celui-ci a mis au fait) s’applique aux objets brevetables non évidents. Si l’objet d’une demande de brevet est rendu public par une personne autre que le demandeur, la période de grâce s’étend de la date d’antériorité à la date de dépôt éventuelle de la demande (tant que cette période ne dépasse pas douze mois). Si une demande internationale de brevet est soumise ultérieurement au Canada, la date de dépôt canadienne correspondra à la date de dépôt à l’international.
En général, les objets jugés brevetables au pays le sont aussi dans la plupart des autres systèmes. Bien qu’on ne puisse pas breveter de simples algorithmes, il est possible de protéger des pratiques commerciales et des méthodes diagnostiques en rédigeant un mémoire descriptif et des revendications conformes aux normes canadiennes. Au Canada, le brevetage de formes de vie supérieures est également restreint. Il est toutefois possible d’obtenir des droits à leur égard en présentant des revendications pour d’autres aspects de l’invention. En date de rédaction de ce guide, les méthodes de traitement médical sont aussi considérées comme non brevetables. Cependant, cette affaire est actuellement en instance devant la Cour suprême du Canada et devrait être tranchée en 2026. Les tribunaux ont reconnu la validité des revendications d’utilisation, y compris de nature médicale, ce qui permet souvent de protéger des inventions comportant des aspects thérapeutiques.
Brevets pharmaceutiques – considérations uniques
Un peu comme aux États-Unis, le Canada possède un système qui lie l’approbation des médicaments génériques et biosimilaires à l’élimination des obstacles que constituent les brevets. Certains types de brevet et de certificats de protection supplémentaire (CPS) peuvent figurer au Registre des brevets pour un nouveau médicament. Tout fabricant de produits génériques souhaitant percer le marché doit alléguer qu’il ne viole aucun brevet valide ou attendre l’expiration des brevets en vigueur. Si l’inventeur décide de contester une allégation de non-violation ou d’invalidité de brevet devant les tribunaux, le fabricant de produits génériques/biosimilaires ne pourra pas entrer sur le marché tant que cette contestation n’aura pas été rejetée. Si elle est acceptée, le fabricant devra patienter jusqu’à la date d’expiration du brevet. L’inscription des brevets au Registre des brevets s’effectue sur une base volontaire. Toutefois, elle permet de tirer profit des règlements de liaison, qui constituent parfois le seul moyen pour une entreprise pharmaceutique novatrice d’obtenir l’équivalent d’une injonction interlocutoire pour protéger son marché jusqu’à ce qu’un litige sur un brevet soit résolu.
Comme nous l’avons précédemment mentionné, certaines catégories de brevet pharmaceutique peuvent être admissibles à un rétablissement de la durée (un certificat de protection supplémentaire). De plus, le formulaire de présentation de drogue nouvelle doit être rempli au Canada dans un délai d’un an suivant le premier dépôt réglementaire semblable aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Union européenne (ou dans l’un de ses pays membres), en Suisse, en Australie ou au Japon. Une protection supplémentaire d’une durée maximale de deux ans peut ainsi être accordée.
En outre, au Canada, les sociétés pharmaceutiques sont tenues de déclarer les brevets et CPS relatifs à un médicament au Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB). Il suffit qu’il y ait « le lien le plus ténu » entre le brevet ou le CPS et le médicament pour que la déclaration du brevet soit obligatoire. Les médicaments faisant l’objet de brevets ou de CPS sont régis par le CEPMB, qui fixe leur prix de vente maximal au Canada pendant la période de validité du brevet ou du certificat. Cependant, le CEPMB n’est pas le seul organe de réglementation des prix de vente des médicaments au pays. Il convient donc de s’adresser à un juriste pour limiter les risques à cet effet.
Protection réglementaire des données
Le Canada encadre la protection des données relatives aux nouveaux médicaments biologiques ou à petites molécules. Les exigences s’appliquent à toutes ces drogues, qu’elles soient brevetées ou non.
La loi prévoit un délai habituel de 8 ans, scindé en deux. Aucun déclarant de médicament générique ou biosimilaire n’est autorisé à remplir un formulaire de présentation de médicaments au Canada pendant les 6 premières années. Il peut le faire au cours des deux années restantes, mais l’autorisation réglementaire ne lui sera pas accordée avant la fin de la période de 8 ans.
Ce délai pourrait toutefois être prolongé de 6 mois si des études pédiatriques sont effectuées et présentées dans une fenêtre de 5 ans après l’obtention de la première autorisation réglementaire.
Marques de commerce
L’image de marque d’une entreprise est ce qui la distingue de ses concurrents. Élément essentiel de cette image, la marque de commerce permet aux clients de différencier facilement les produits et services de l’entreprise de ceux de la concurrence.
Au Canada, une marque de commerce peut consister en un mot, un dessin ou une combinaison des deux, ou en d’autres traits distinctifs (comme une forme, une couleur ou un son).
Au cours des dernières années, la législation et les processus entourant les marques de commerce au pays ont connu de grandes transformations aux fins d’harmonisation avec les traités internationaux. Ainsi, le Canada compte maintenant parmi les signataires du Protocole de Madrid et utilise la classification de Nice pour catégoriser les produits et services.
De plus, aux termes des modifications apportées à la Loi sur les marques de commerce, les personnes présentant une demande de marque ne sont plus tenues de remplir un formulaire de déclaration, que ce soit lors du dépôt ou à tout autre moment précédant l’enregistrement, ni de fournir une quelconque preuve d’utilisation pour maintenir l’enregistrement d’une marque. Ces changements ont grandement simplifié le processus d’enregistrement des marques, bien que le Canada – comme les États-Unis – exige tout de même que les demandeurs décrivent en détail les produits et services ciblés.
L’enregistrement d’une marque de commerce procure des avantages non négligeables. En premier lieu, elle octroie au propriétaire le droit exclusif d’utiliser la marque déposée pour des produits et des services précis, et de protéger cette marque partout au Canada. L’enregistrement permet aussi d’exercer certains recours en cas de violation, qui ne sont pas accessibles pour les marques non déposées.
La Loi visant à combattre la contrefaçon de produits du Canada a été adoptée pour permettre aux propriétaires de marques de commerce de s’attaquer à l’importation et à la possession de produits contrefaits, et d’exiger la destruction de ceux-ci. Elle autorise l’enregistrement de marques de commerce auprès de l’Agence des services frontaliers du Canada et prévoit d’importantes sanctions pénales contre les personnes qui, en toute connaissance de cause, fabriquent, importent, exportent, vendent ou distribuent « à l’échelle commerciale » des produits, des étiquettes, des emballages et du matériel publicitaire arborant une marque identique ou intrinsèquement trop semblable à une marque déposée.
Cependant, tous les produits et services visés par une demande de marque de commerce canadienne doivent être décrits dans les termes ordinaires du commerce. L’obligation de décrire de façon détaillée les produits et services demeure inchangée par les modifications apportées à la Loi sur les marques de commerce susmentionnée.
Tant qu’elle est renouvelée, une marque déposée peut demeurer en vigueur indéfiniment.
Le processus d’enregistrement complet prend de 18 à 24 mois si aucune objection n’est soulevée. On peut généralement employer une marque de commerce avant la fin de ce processus, mais une recherche exhaustive s’impose pour confirmer qu’elle n’est pas déjà utilisée.
Au Canada, le propriétaire d’une marque de commerce doit contrôler la nature ou la qualité des produits et services offerts par ses titulaires de licence. Cette exigence législative s’applique même lorsque le propriétaire autorise une de ses filiales à utiliser sa marque de commerce. Tout manquement à cette règle pourrait nuire à l’intérêt du propriétaire de la marque de commerce. En outre, les propriétaires de marques qui font affaire au Québec doivent s’assurer que leurs emballages, leurs étiquettes et leur matériel publicitaire respectent la Charte de la langue française et les règlements connexes, qui visent à assurer un rayonnement suffisant du français.
Sous réserve de certaines conditions, les gouvernements étrangers, les forces armées, les universités et les organisations intergouvernementales internationales peuvent demander que leurs drapeaux, armoiries ou emblèmes nationaux, territoriaux, municipaux ou autres soient considérés comme des marques officielles. Une telle reconnaissance peut empêcher l’enregistrement de marques identiques ou semblables au point de créer la confusion. Les marques officielles ne sont pas contestables par un tiers, et elles ont cours jusqu’à leur abandon volontaire par le détenteur ou leur invalidation par ordonnance d’un tribunal. De plus, elles peuvent viser tout type de produits ou de services, elles ne sont pas soumises à des examens de validité relative ou absolue, et elles n’ont pas à être renouvelées périodiquement.
Droit d’auteur
Le droit d’auteur permet de protéger les créations originales, comme les œuvres littéraires, musicales, dramatiques et artistiques.
Le droit d’auteur comporte notamment « le droit exclusif de produire ou de reproduire la totalité ou une partie importante de l’œuvre, sous une forme matérielle quelconque, d’en exécuter et d’en représenter la totalité ou une partie importante en public et, si l’œuvre n’est pas publiée, d’en publier la totalité ou une partie importante ».
Le droit d’auteur s’applique aux auteurs admissibles de certains types d’œuvres qui sont Canadiens ou citoyens ou résidents d’un pays du Commonwealth ou d’un autre pays qui, comme le Canada, a ratifié la Convention de Berne. Ainsi, l’œuvre littéraire, musicale, dramatique ou artistique originale d’un auteur admissible sera protégée par le droit d’auteur au Canada dans la mesure où elle constitue un tout physique (texte, enregistrement ou œuvre d’art, par exemple). En règle générale, le droit d’auteur reste en vigueur au Canada de son obtention jusqu’au 70e anniversaire de décès de son auteur, ou moins longtemps pour certaines œuvres.
Les catégories d’œuvres dites littéraires, musicales, dramatiques et artistiques sont définies de façon générale. Par exemple, les œuvres artistiques comprennent non seulement les peintures et les sculptures, mais également les cartes géographiques, les graphiques, les plans et l’architecture. Dans un même ordre d’idées, les œuvres littéraires englobent les programmes informatiques. Pour qu’une œuvre puisse être protégée par des droits d’auteur, elle doit être originale, c’est-à-dire qu’elle doit avoir été créée par son auteur et ne pas être copiée d’une autre source.
Rien n’exige que le droit d’auteur soit enregistré au Canada. Si l’auteur est jugé admissible et que l’œuvre respecte les exigences établies, celle-ci sera protégée par un droit d’auteur au Canada. Toutefois, l’enregistrement confère certains avantages, comme l’établissement de l’existence du droit d’auteur, ainsi qu’une présomption de propriété qui permet au propriétaire de faire respecter ce droit. Il n’y a aucun délai prescrit pour enregistrer un droit d’auteur ni aucun processus d’examen pour qu’il soit accordé.
Les droits moraux des auteurs sont également protégés. Ils garantissent que l’auteur est correctement désigné (ou que son anonymat est respecté) et que l’œuvre n’est pas modifiée de manière à nuire à la réputation de celui-ci. Seul l’auteur peut faire valoir ses droits moraux, qui sont incessibles.
Il y a violation du droit d’auteur lorsqu’un tiers pose un geste réservé au titulaire du droit (à moins que cette personne n’y consente). Le non-respect des droits moraux est aussi passible de pénalités. Il existe des recours en cas de violation du droit d’auteur ou des droits moraux, ainsi que des exceptions, comme l’utilisation équitable.
La Commission du droit d’auteur du Canada supervise et gère l’administration des droits d’auteur par les sociétés de gestion collective. Celles-ci peuvent être responsables de collections d’œuvres colossales en fonction des droits qu’elles défendent et encadrent. La Commission a pour mandat principal d’homologuer les tarifs des redevances proposées par les sociétés de gestion collective.
Quand l’une de ces sociétés et un utilisateur ne s’entendent pas sur les redevances ou les modalités d’utilisation de certaines œuvres, la Commission peut trancher la question.
Il est interdit de contourner les verrous numériques employés par le titulaire d’un droit d’auteur pour empêcher la diffusion non autorisée de ses œuvres protégées. Il existe toutefois une exception à cette règle pour la rétro-ingénierie servant à mener des tests de sécurité et la recherche connexe. De plus, la loi prévoit d’autres exceptions pour les copies temporaires, techniques et accessoires de matériel protégé par le droit d’auteur. Ces dérogations peuvent renforcer la confiance des sociétés d’innovation du secteur de l’informatique et des logiciels. De récentes modifications ont d’ailleurs été apportées à la Loi sur le droit d’auteur pour permettre à une personne de contourner une mesure technique de protection dans le seul but d’effectuer un entretien, une réparation ou un diagnostic sur un produit.
De plus, les fournisseurs de services Internet et de moteurs de recherche ne peuvent être tenus responsables de leurs utilisateurs qui enfreignent les politiques établies. Un « régime d’avis et avis » permet cependant aux titulaires de droits d’auteur de signifier à ces intermédiaires toute atteinte présumée à leurs droits; les fournisseurs transmettent alors l’avis ainsi reçu aux contrevenants allégués.
Comme ses dispositions sont « neutres » du point de vue technologique, la Loi sur le droit d’auteur est conçue pour s’adapter à l’évolution constante et rapide du numérique. Elle offre ainsi une plus grande certitude aux entreprises qui œuvrent dans le domaine des technologies de pointe.
La Loi sur le droit d’auteur prévoit des recours civils et criminels, de même que des mesures coercitives à la frontière, pour lutter contre la contrefaçon et l’importation ou l’exportation de biens contrefaits.
Dessins industriels
Les dessins industriels protègent l’aspect distinctif et visuellement attrayant d’un objet fini, c’est-à-dire sa forme, sa configuration, son motif et ses éléments décoratifs d’origine, ainsi que la combinaison de ces caractéristiques.
Il peut s’agir, entre autres, de dessins de meubles, de chaussures, de téléphones intelligents, de bouteilles, de véhicules, d’articles ménagers, de jouets et de tissus. Les caractéristiques nominales strictement fonctionnelles d’un article et les méthodes ou principes généraux de fabrication ou de construction de celui-ci ne peuvent être qualifiés de dessins industriels (mais peuvent être brevetables).
Pour être enregistrable, le dessin doit constituer une œuvre inédite de l’esprit de son auteur. Au minimum, il ne doit pas ressembler à un dessin déjà enregistré ni être considéré comme commun ou généralisé.
Au Canada, une demande d’enregistrement sera refusée si elle est déposée plus d’un an après la publication du dessin où que ce soit dans le monde.
La protection entre en vigueur à la date l’enregistrement et se termine au moment le plus tardif entre le 10e anniversaire de l’enregistrement ou 15 ans après la date de dépôt au Canada, sous réserve du paiement des frais de maintien.
Une fois le dessin enregistré, les articles qui l’intègrent doivent être marqués de façon à faire état de l’enregistrement. Un marquage inadéquat peut empêcher le recouvrement de dommages-intérêts auprès d’un contrevenant.
Secrets commerciaux
Un secret commercial est un renseignement commercial confidentiel qui a de la valeur. En voici quelques exemples : inventions (à moins qu’elles ne soient mentionnées dans une demande de brevet), formules chimiques, compilations de données, recherches, techniques et procédés commerciaux et renseignements de commercialisation.
Les secrets commerciaux ne sont pas enregistrés, mais doivent demeurer confidentiels. Ils peuvent être protégés pendant une période illimitée si l’on parvient à les garder secrets. Les entreprises doivent se doter de mesures de protection et de processus garantissant que les secrets commerciaux ne seront pas divulgués ou détournés.
Dans le cas d’inventions, une entreprise peut demander une protection par brevet ou choisir de préserver le caractère confidentiel de son secret commercial. La décision dépend de divers facteurs : la probabilité que l’invention puisse demeurer secrète et ne pas être reproduite par rétro-ingénierie, les chances qu’un concurrent élabore de son côté un élément visé par le même secret commercial et la probabilité d’obtention d’un brevet.
Autres formes de propriété intellectuelle
Au Canada, les droits relatifs aux topographies de circuits intégrés et aux obtentions végétales sont protégés.
Commercialisation et octroi de licence
Grâce à la commercialisation, on peut tirer de la valeur de la propriété intellectuelle – que ce soit en utilisant cette PI, en en concédant des licences, en vendant des articles associés à la PI (ou la PI elle-même) et en faisant valoir des droits de PI.
En règle générale, tous les types de PI peuvent faire l’objet d’un contrat de licence au Canada, où il n’existe aucune loi régissant la concession de telles licences. Ce sont plutôt les principes généraux de common law qui s’appliquent en la matière. Les licences d’exploitation de marques de commerce doivent également respecter les exigences de contrôle abordées dans la Loi sur les marques de commerce.
Le concédant peut accorder une licence à un ou plusieurs titulaires, et dispose de nombreuses options pour établir les limites de la licence.
Il existe trois principaux types de licences, soit la licence exclusive, la licence unique et la licence non exclusive. La licence exclusive confère à son titulaire le droit réservé d’utiliser la PI concédée (ce que ne pourra plus faire le concédant). La licence unique permet au titulaire et au concédant, et à eux seuls, d’utiliser la PI. Une licence non exclusive permet au concédant d’attribuer autant de licences qu’il le souhaite. La plupart des licences de logiciels commerciaux sont non exclusives.
Bien que les licences puissent être illimitées, elles comprennent souvent des restrictions de durée, de territoire ou d’utilisation imposées par le concédant. On peut limiter la portée géographique d’une licence pour circonscrire l’utilisation ou la commercialisation des droits de PI à une région donnée. Il est aussi possible de limiter la durée de validité d’une licence, par exemple à 365 jours ou à 10 ans. Enfin, une licence peut restreindre à quelques secteurs ou activités l’emploi que fait le titulaire des droits de PI visés. Les recours possibles en cas de non-respect d’une licence de propriété intellectuelle sont les mêmes qu’en cas de rupture de contrat.
Application des droits de propriété intellectuelle
Au Canada, les litiges en PI sont principalement entendus par la Cour fédérale, qui a le pouvoir de prononcer une injonction nationale et la compétence exclusive d’invalider des brevets, des marques de commerce et des dessins industriels in rem. Ainsi, bien que leurs feuilles de route diffèrent et qu’ils ne soient pas tous versés dans les domaines techniques, les juges fédéraux ont généralement une plus grande expérience des questions de PI que leurs homologues provinciaux.
La compétence de la Cour fédérale est établie par la loi. Par conséquent, un tribunal provincial pourrait être mieux habilité à régler des différends portant en grande partie sur un délit ou une rupture de contrat.
Il existe aussi une procédure spéciale pour certains types de brevets pharmaceutiques inscrits au Registre des brevets, dont il a été question précédemment. Ces dossiers doivent être soumis à la Cour fédérale.
Il peut s’avérer difficile d’obtenir une injonction interlocutoire dans bon nombre de cas de violation des droits de PI, en particulier ceux de contrefaçon de brevet, car il faut entre autres prouver l’existence d’un préjudice irréparable qu’aucuns dommages-intérêts ne pourraient pallier, et la jurisprudence a fixé la barre très haut en la matière. Toutefois, dans quelques dossiers, le tribunal a reconnu ledit préjudice et accordé l’injonction interlocutoire demandée.
Une procédure de litige se déroule généralement comme suit : acte de procédure, administration de la preuve, préparation des rapports d’experts (au besoin) et procès. Dans certains cas complexe, on peut lancer un processus de gestion d’instance pour aider les parties à se préparer au procès dans les délais impartis. Les témoins experts ne sont pas interrogés par la partie adverse avant la tenue du procès. La preuve ne doit porter que sur des enjeux connexes à l’acte de procédure. En général, les documents présentés ne devraient servir qu’à renforcer ou à contredire les arguments et la documentation que l’une ou l’autre des parties compte faire valoir au procès. Un seul représentant par partie fait l’objet d’un interrogatoire préalable. Toutefois, il est possible de questionner les inventeurs et les cédants. Pour interroger toute autre personne, les parties doivent présenter une requête.
Le Canada ne possède pas d’équivalent à l’audience Markman. Les requêtes en jugement sommaire sont difficiles à présenter vu tous les critères à respecter. Cependant, le Canada permet le procès sommaire pour simplifier le processus de litige ou trancher des questions qui ne requièrent pas un procès en bonne et due forme.
Le système juridique canadien est principalement fondé sur la common law (sauf au Québec où les tribunaux provinciaux se basent sur le droit civil pour régler les litiges). Les procès durent généralement deux semaines ou moins et se déroulent devant un juge seul. Les deux parties peuvent ensuite porter la cause en appel de plein droit. Notons qu’une portion des honoraires d’avocats sont habituellement accordés à la partie ayant gain de cause.
Une injonction permanente est souvent accordée par la Cour fédérale lorsque les droits de propriété intellectuelle sont encore valides à la fin du procès. Une telle décision s’accompagne généralement d’une ordonnance visant la remise ou la destruction de la marchandise contrefaite. Les parties peuvent aussi demander une ordonnance pour obtenir des dommages-intérêts ou connaître les profits réalisés par le contrefacteur.
Parallèlement, des dommages-intérêts antérieurs et postérieurs au jugement sont souvent accordés et les parties peuvent réclamer des dommages-intérêts punitifs pour toute conduite abusive. La Cour fédérale est un tribunal d’equity qui examine les recours en equity selon le principe d’équité.
Stratégie de propriété intellectuelle
Bien que chaque actif de propriété intellectuelle puisse avoir de la valeur, celle-ci peut être bonifiée en adoptant une approche stratégique, exhaustive et intégrée. Une telle stratégie doit couvrir la protection des inventions, de l’image de marque et des créations d’une entreprise pour que celle-ci puisse exploiter pleinement sa PI et prendre les mesures appropriées à l’endroit des contrefacteurs. Celle des entreprises pharmaceutiques ou biotechnologiques doit aussi tenir compte des dispositions réglementaires pouvant influer sur les droits de PI au Canada. Il sera ainsi plus facile de maximiser et de préserver la valeur de sa propriété intellectuelle.