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Perspectives

Pleins feux sur les OPC alternatifs : les occasions qui s’offrent à vous en 2020

En cette année 2020, les placements non traditionnels ont la cote : les investisseurs cherchent des occasions de placement qui leur permettent de faire face à la volatilité des marchés découlant de la pandémie de COVID-19. Les fonds communs de placement alternatifs ‒ ou OPC alternatifs ‒ (familièrement appelés « fonds alternatifs liquides ») peuvent s’avérer utiles pour les investisseurs qui veulent protéger leurs placements tout en profitant des occasions offertes par les marchés. Alors qu’en ces temps de pandémie, les investisseurs se montrent de plus en plus ouverts à des possibilités de placements non traditionnels, les fonds alternatifs liquides pourraient devenir un élément incontournable de « l’équipement de protection individuelle » d’un portefeuille.

Les fonds alternatifs liquides font partie des placements non traditionnels qui ont fait l’objet d’une grande attention dans la dernière année. Des modifications au Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement (Règlement 81-102), entrées en vigueur le 3 janvier 2019, autorisent désormais la vente de fonds assortis de stratégies de placement non traditionnelles à des particuliers investisseurs. Les OPC alternatifs sont donc régis depuis un an et demi par le Règlement 81-102; dans le présent article, nous vous présentons notre perspective sur ce qui s’est passé sur le marché des fonds alternatifs liquides depuis 2019, les questions qui se sont posées et la façon dont elles ont été résolues ainsi que celles qui restent en suspens

Changements apportés par la réglementation visant les >fonds alternatifs liquides

Les fonds alternatifs liquides sont à la croisée des OPC classiques et des fonds de couverture privés. Depuis les modifications de 2019 au Règlement 81-102, les restrictions de placement pour les fonds alternatifs liquides sont plus souples que celles visant les OPC traditionnels. Plus précisément, ces modifications permettent aux fonds alternatifs liquides d’emprunter de l’argent, de vendre de titres à découvert et de réaliser une opération sur dérivés de façon à exercer un effet de levier sur le fonds jusqu’à 300 % de sa valeur liquidative, sous réserve de certaines conditions1.

Le point sur les marchés depuis janvier 2019

Un an et demi après l’instauration du nouveau régime, la Canadian Association of Alternative Strategies and Assets (CAASA) a indiqué que le marché des fonds alternatifs liquides avait atteint une valeur d’environ 10 G$ au Canada et qu’en juillet 2020, pas moins de 106 fonds alternatifs liquides avaient été lancés par près de 40 gestionnaires différents. Les sociétés appartenant à des banques et les grandes sociétés de fonds d’investissement indépendantes dominent désormais le marché : l’Alternative Investment Management Association (AIMA) a révélé qu’au début de l’année 2020, plus des deux tiers des actifs gérés l’étaient par ces gestionnaires.

Actuellement, le marché des fonds alternatifs liquides est dominé par les fonds d’actions axés sur la génération d’alpha plutôt que par des fonds employant des stratégies neutres par rapport au marché ou des fonds à revenu fixe s’appuyant sur des stratégies de crédit. Nous avons également pu observer le lancement d’un certain nombre de fonds multi-stratégies. Selon nous, l’absence de stratégies neutres par rapport au marché s’explique en partie par le fait que les restrictions de placement établies par le Règlement 81-102 ne sont pas suffisamment souples pour en permettre la mise en œuvre en l’absence de dispense. En règle générale, les gestionnaires de fonds alternatifs liquides ont mis en place des clauses de rachat, des frais de gestion et des placements minimaux peu élevés, à l’image des OPC classiques. Un certain nombre de fonds versent également une rémunération au rendement, qui se situe généralement entre 15 % et 20 %. Toutefois, certains gestionnaires ont choisi de s’aligner sur les structures de rémunération appliquées aux fonds classiques et de ne pas facturer du tout de rémunération au rendement aux fonds.

Si un certain nombre de fonds alternatifs liquides sont issus de la conversion de fonds de couverture privés en fonds admissibles au régime de prospectus du Règlement 81-102, d’autres sont de nouveaux fonds. Quelques fonds alternatifs liquides sont nés de la conversion de fonds qui étaient admissibles au régime des fonds du marché à terme ou de la conversion d’OPC classiques existants. La conversion d’un fonds privé existant présente plusieurs avantages, notamment la possibilité d’obtenir une dispense permettant de divulguer le rendement passé, dans la mesure où la stratégie du fonds est conforme au Règlement 81-102. Ainsi, si le fonds possède un long historique, le placement de ses parts sera plus facile, car les courtiers et les investisseurs seront mieux en mesure de comprendre le rendement global du produit.

Obstacles au placement des parts

Bien que les fonds alternatifs liquides aient récemment gagné en popularité, cette nouvelle catégorie s’accompagne de quelques enjeux systémiques qui peuvent limiter l’adoption et le placement à grande échelle de ces nouveaux produits.

Niveaux de risque

D’après le Règlement 81-102, un OPC alternatif doit s’accompagner d’un niveau de risque calculé selon la méthodologie prescrite par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), basée sur la volatilité du fonds. Grâce à cette méthodologie, de nombreux fonds alternatifs liquides peuvent obtenir un niveau de risque plus faible parce qu’ils appliquent des stratégies visant à atténuer leur volatilité. Malgré tout, de nombreux courtiers choisissent d’attribuer un niveau de risque plus élevé aux OPC alternatifs qu’ils proposent, ce qui a pour effet de limiter le nombre de clients auxquels les fonds alternatifs liquides peuvent convenir, étant donné l’impression selon laquelle les stratégies non traditionnelles sont plus risquées. En outre, même lorsque des fonds alternatifs liquides pourraient convenir à un client, le niveau de risque plus élevé peut dissuader un courtier d’investir une part importante d’un portefeuille dans des OPC alternatifs.

Exigences de formation

Lorsque le régime des fonds alternatifs liquides a été mis en place, les ACVM ont déclaré que la prochaine phase des modifications porterait sur la mise à jour des exigences de formation pour les représentants (conseillers) qui vendent ces fonds. Dans l’intervalle, les ACVM ont décidé de conserver les exigences de formation existantes du Règlement 81-104 sur les organismes de placement collectif alternatifs pour ce qui touche les placements de titres de fonds du marché à terme.

Actuellement, pour pouvoir proposer des fonds alternatifs liquides à leurs clients, les conseillers doivent suivre l’un des trois cours proposés :

  • Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada;
  • Cours d’initiation aux produits dérivés;
  • Programme d’analyste financier agréé.

De nombreux conseillers inscrits auprès de sociétés membres de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) n’ont pas suivi ces cours. Ainsi, contrairement aux idées reçues, il n’est pas interdit aux conseillers agréés par l’ACCFM d’offrir des fonds alternatifs liquides. Toutefois, la plupart des conseillers et des superviseurs de l’ACCFM n’ont pas la formation requise. Les exigences actuelles limitent dans les faits la vente de fonds alternatifs liquides aux conseillers inscrits auprès de courtiers en valeurs mobilières qui sont membres de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM).

La discussion se poursuit sur les nouvelles normes de formation à mettre en place pour ce qui touche la vente de fonds alternatifs liquides. Bien que ce point figure parmi les priorités réglementaires depuis un certain temps, nous n’avons pas noté d’action significative de la part des ACVM. Ce silence a incité un certain nombre d’associations professionnelles à formuler leurs propres recommandations sur ce que devraient être les nouvelles exigences de formation relativement aux fonds alternatifs liquides, de façon à établir une norme moins contraignante pour les conseillers.

Recommandations de l’AIMA

Le 30 janvier 2020, l’AIMA a publié une proposition recommandant que les sociétés membres de l’ACCFM puissent faire leur choix parmi les outils d’apprentissage acceptables actuellement offerts sur le marché par des organismes indépendants. Elle a particulièrement recommandé la certification octroyée par la CAIA, le cours d’initiation de la CAIA sanctionné par un certificat et le cours de CSI intitulé « Stratégies de placement alternatives : fonds de couverture et fonds alternatifs liquides ». L’AIMA a également préconisé de procéder à une élaboration échelonnée des normes de compétence afin de permettre aux membres de l’ACCFM de préparer un cours « interne » personnalisé qui pourrait également satisfaire à la norme.

Recommandations de l’IFIC

De même, en février 2020, l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC) a proposé, dans une lettre adressée à l’ACCFM et à la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO), des modifications aux exigences de formation visant les conseillers de l’ACCFM. Selon l’IFIC, l’ACCFM devrait travailler main dans la main avec des fournisseurs de cours, tels l’Institut IFSE (IFSE) et CSI Global Education Inc. (CSI), afin de mettre en place un cours et un examen de transition pour les courtiers déjà agréés. Cette exigence s’appliquerait aux superviseurs également. Le cours porterait sur les éléments clés des OPC alternatifs et inclurait tout le contenu lié aux fonds que le cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada aborde, mais qui ne figure pas actuellement dans les cours de l’IFSE et du CSI sur les fonds d’investissement. Pour ceux qui souhaitent s’inscrire, l’IFIC propose que le cours sur les fonds d’investissement au Canada ou le cours « Fonds d’investissement au Canada » tienne compte de ce « contenu de transition ».

Les ACVM n’ont pas indiqué publiquement dans quelle mesure elles avaient progressé dans l’examen de ces recommandations. Étant donné qu’elles ont établi les exigences de formation existantes dans une de leurs modifications réglementaires, tout changement à ces exigences doit s’accompagner d’une action de leur part pour être mis en œuvre.

Dispense

Depuis 2019, les ACVM ont accordé diverses dispenses pour répondre aux préoccupations soulevées par le nouveau régime. Ainsi, des dispenses ont été consenties afin :

  • de lever les restrictions de vente à découvert pour permettre à un fonds de vendre à découvert des « titres d’État » jusqu’à concurrence de 300 % de la valeur liquidative du fonds;
  • d’assouplir les exigences relatives à la garde de manière à autoriser le dépôt d’actifs qui représentent plus de 25 % de la valeur liquidative du fonds alternatif liquide auprès d’un agent prêteur qui n’est pas son dépositaire ou son sous-dépositaire à titre de sûreté à l’égard d’une vente à découvert de titres;
  • de permettre l’inclusion, dans les communications commerciales, l’aperçu du fonds et les rapports annuels ou intermédiaires de la direction sur le rendement du fonds, des données relatives au rendement passé d’un fonds qui correspondent à la période précédant sa transformation en émetteur assujetti;
  • d’autoriser un fonds à acheter les titres d’un émetteur au-delà de la limite de 20 % de la valeur liquidative pour un même émetteur;
  • d’autoriser un fonds à vendre à découvert des parts de fonds indiciels visés (appelées « parts indicielles ») jusqu’à concurrence de 100 % de la valeur liquidative du fonds au moment de la vente;
  • d’autoriser la vente à découvert jusqu’à un maximum de 100 % de la valeur liquidative d’un fonds dans le cadre d’une stratégie « neutre par rapport au marché » ou d’autres stratégies de vente à découvert;
  • de permettre une exposition globale aux emprunts d’argent, aux ventes à découvert et aux opérations sur dérivés visés supérieure à 300 % de la valeur liquidative du fonds;
  • d’assouplir les exigences relatives à la garde pour permettre aux fonds de désigner plus d’un dépositaire dans le cadre d’opérations de prêt;
  • de lever la restriction en matière de concentration afin de pouvoir investir plus de 20 % de la valeur liquidative dans des titres de créance émis ou garantis par la Federal National Mortgage Association (Fannie Mae) ou la Federal Home Loan Mortgage Corporation (Freddie Mac);
  • d’autoriser un fonds à traiter les ordres d’achat et de rachat de parts chaque mois ou deux fois par mois;
  • d’autoriser un OPC alternatif à combiner son prospectus simplifié avec celui d’un fonds commun de placement classique. Étant donné que le Règlement 41-101 sur les obligations générales relatives au prospectus ne contient pas d’obligation équivalente, le prospectus d’un fonds alternatif liquide négocié en bourse peut être combiné avec un prospectus pour un fonds négocié en bourse (FNB) classique sans dispense.

Les ACVM ont également précisé que, nonobstant les déclarations faites précédemment, rien dans le Règlement 81-102 n’empêchait un fonds alternatif liquide d’autoriser la réutilisation de garanties grevant des actifs du portefeuille qu’il avait déposés.

Perspective sur l’avenir des fonds alternatifs liquides

Le marché des OPC alternatifs est encore relativement nouveau au Canada et présente un grand potentiel de croissance. La dynamique actuelle du marché contribuera probablement à renforcer l’attrait des placements non traditionnels, les fonds alternatifs liquides devenant une option de plus en plus séduisante pour les investisseurs lorsque les marchés ne sont pas à la hausse. Les changements relatifs à l’utilisation des niveaux de risque et la révision des exigences de formation sont des facteurs supplémentaires qui devraient favoriser la démocratisation de cette catégorie de produits dans un avenir proche.

Le secteur continuera de surveiller et d’évaluer de près la manière dont les fonds alternatifs liquides se comportent au cours de l’année prochaine, cela ne fait aucun doute. Nous vous encourageons à communiquer avec le groupe Gestion des investissements de BLG pour discuter de la façon dont vous pouvez offrir des OPC alternatifs. Nous collaborons très souvent avec les gestionnaires de fonds alternatifs et serions ravis de déterminer avec vous la marche à suivre pour créer un nouvel OPC alternatif ou convertir vos fonds existants en fonds communs de placement alternatifs dans le respect des règles. Pour en savoir plus, communiquez avec l’un des auteurs du présent bulletin ou tout autre membre du groupe Gestion des investissements de BLG.

Les auteurs tiennent à remercier Samantha Cardinale, étudiante d’été en droit chez BLG, pour sa participation à la rédaction de la version originale anglaise du présent article.


1 Voir le bulletin de BLG de 2018 intitulé « Canadian Securities Regulators Permit Retail Liquid Alt Funds and Ease (Some) Investment Restrictions for all Public Funds » pour en savoir plus sur les modifications apportées au Règlement 81-102 et sur les restrictions de placement visant les fonds alternatifs liquides.

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